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Développer les langues de spécialité dans le secteur LANSAD – Scénarios possibles et parcours recommandé pour contribuer à la professionnalisation des formations

Developing specialised languages for specialists of other disciplines – Optional scenarios and a recommended route to contribute to the professionalisation of language learning
Michel Van der Yeught
p. 12-32

Résumés

Cet article analyse la façon dont les langues de spécialité peuvent contribuer à la professionnalisation des apprenants dans l’enseignement supérieur. L’auteur rappelle d’abord que la récente mission professionnalisante des universités se démarque nettement de la vocation traditionnelle qu’elles se reconnaissent et que l’expansion rapide des langues dans les cursus non linguistiques (le secteur LANSAD) ne bénéficie pas des conditions les plus favorables. Il souligne la vitalité des innovations en LANSAD et les mérites de l’approche anglo-saxonne de l’English for Specific Purposes, mais il insiste également sur leurs limites et particulièrement sur l’incapacité du secteur à former ses futurs enseignants. En réponse, il préconise un parcours d’action stratégique qui consiste à refonder la recherche en langues de spécialité et à mettre en place des formations en langues étrangères spécialisées capables de contribuer efficacement à la professionnalisation des apprenants. À ses yeux, les atouts spécifiques des linguistes des IUT et de l’APLIUT les appellent à jouer un rôle central dans cette entreprise.

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Texte intégral

Introduction

  • 1 Cet article est issu d’une conférence plénière présentée le 31 mai 2013 à l’IUT de Montpellier dans (...)

1Au cours des dix dernières années, l’enseignement supérieur français a adopté la professionnalisation comme mission centrale et, en 2013, le 35e congrès de l’APLIUT a choisi comme thématique de travail « Langues de spécialité et professionnalisation »1. Dès les origines, la préoccupation première des linguistes impliqués dans le développement des langues de spécialité (LSP) et de ce qu’on appelle l’English for Specific/Special Purposes (ESP) dans les pays anglo-saxons a été de mieux répondre aux besoins professionnels des apprenants. Ces dernières années, les relations entre les langues de spécialité et la professionnalisation sont devenues un sujet d’une brûlante actualité. Dans leur grande majorité, les praticiens du domaine s’accordent sur le fait que les LSP ont vocation à jouer un rôle éminent dans la professionnalisation des apprenants, mais les avis divergent sur les scénarios envisageables pour y parvenir. Cet article se propose d’établir un état des lieux sur la question et de recommander un parcours d’action susceptible de mobiliser l’ensemble de la communauté des acteurs des LSP en France. Il ne se limite pas aux IUT et tente de répondre de façon générale à la question « comment les langues de spécialité peuvent-elles contribuer à la professionnalisation de nos étudiants ? ». Il ne tente pas d’avancer des recettes particulières à appliquer ici ou là, mais plutôt d’ébaucher une réflexion stratégique prenant en compte l’ensemble de la chaîne des parties prenantes au domaine : chercheurs, enseignants, étudiants et employeurs.

2La démarche comprend trois étapes. Premièrement, il paraît important, avant même d’y faire intervenir le cas spécifique des LSP, d’évaluer les relations entre l’enseignement supérieur et la professionnalisation parce que bon nombre des difficultés qui se présentent actuellement pour articuler ces deux missions découlent précisément de ces relations, particulièrement en ce qui concerne les langues. Deuxièmement, il convient d’examiner les parcours d’action déjà proposés et souvent mis en œuvre pour professionnaliser nos formations. Le questionnement se rapproche par là des interrogations propres au secteur LANSAD, le vaste territoire de l’enseignement supérieur qui comprend les LANgues pour Spécialistes d’Autres Disciplines, c’est-à-dire toutes les formations non linguistiques dans lesquelles des langues sont enseignées. Un rapide état des lieux de ces avancées est dressé et leurs insuffisances repérées afin de mesurer ce qu’il reste à accomplir. Enfin, à partir de ce diagnostic, un parcours d’action qui semble pouvoir être recommandé est proposé comme réponse adaptée et durable à la question posée.

1. Les relations entre l’enseignement supérieur et la professionnalisation

3Dans cette partie, il est avancé que mesurer les enjeux de la question « comment les langues de spécialité peuvent-elles contribuer à la professionnalisation ? » exige de les situer dans le contexte plus large dans lequel ils s’inscrivent : les relations entre l’enseignement supérieur et la professionnalisation. Les universitaires français savent désormais que professionnaliser leurs formations figure prioritairement parmi leurs missions et il semble que toutes les parties prenantes à la question – pouvoirs publics, établissements, partenaires sociaux, mouvements politiques, associations étudiantes et familles – s’accordent sur ce point : le consensus paraît entier.

4Pourtant, si cette unanimité était vraiment si robuste, cette mission ne resterait pas si difficile à mettre en œuvre et ses artisans ne se heurteraient pas à autant de difficultés, notamment pour ce qui concerne les langues. L’ESP date des années 1960 et les LSP se sont développées en France à partir des années 1970 sans que la communauté qui s’y implique puisse se prévaloir en 2013 d’avoir mis en place un modèle global d’application des langues à la professionnalisation des apprenants. La raison de cette lenteur tient à la nouveauté de l’unanimité sur la mission de la professionnalisation des universités. Son caractère récent apparaît rapidement si les relations entre le système universitaire et le monde professionnel sont mises en perspective sur le long terme. À vrai dire, depuis longtemps et presque jusqu’à aujourd’hui, elles ont été fort médiocres.

1.1. La tradition universitaire occidentale et la « vita activa »

5L’environnement quotidien en montre à chacun la cause. Il suffit de considérer les appellations associées aux institutions éducatives occidentales. En France, les élèves étudient dans des « collèges » et des « lycées » regroupés en « académies ». Les lycées sont appelés « athénées » en Belgique, et « Gymnasium » en Allemagne. Les chercheurs se retrouvent dans des congrès souvent nommés « symposium » en souvenir des repas où Socrate dialoguait avec ses disciples. Tous ces noms rappellent que les systèmes pédagogiques occidentaux ont été durablement marqués par l’expérience éducative gréco-latine. Un examen plus serré nous montre que nos universités ont été construites comme des extrapolations fidèles de l’allégorie de la caverne de Platon.

6Dans le Livre VII de La République, Socrate explique que les hommes sont emprisonnés dans une caverne obscure et qu’ils ne perçoivent que les ombres des choses. L’un d’entre eux sort enfin à l’air libre et il est aveuglé par la lumière du soleil et des idées. Il en tire la sagesse, la sophia, alors que ses infortunés compagnons laissés au fond des ténèbres sont condamnés au faux savoir éphémère de la doxa, l’opinion. Le mythe commence par ces mots de Socrate : « représente-toi notre nature, selon qu’elle est ou qu’elle n’est pas éclairée par l’éducation, d’après le tableau que voici » (Platon 1971 : 216). Depuis plus de dix siècles, les universités occidentales puisent dans ces quelques mots le sens et la noblesse de leur mission. Elles ont donné une forme institutionnelle à la progression platonicienne de la sortie de la caverne qui mène de l’ombre vers la lumière.

7Par un cursus progressivement gradué, elles conduisent le bachelier de l’ignorance à la science par les étapes de la licence à la maîtrise et enfin au doctorat, grade ultime qui confère le titre de savant, « doctus », à celui qui pénètre l’essence des choses. Le Ph.D. anglo-saxon, le « doctorat en philosophie », illustre toujours cette vénérable tradition. Certes, il est conféré dans toutes les matières, mais il suggère que l’accès à un niveau suprême de connaissance apporte l’illumination philosophique quelle que soit la discipline qui y mène.

8En revanche, la caverne est le monde fluctuant et contingent des hommes, le monde des actions humaines et du labeur quotidien, celui des apparences changeantes et des savoirs fragiles. L’homme y travaille avec ses mains – d’ailleurs, il s’agit souvent d’un esclave – et non à l’aide de son intellect. Dans ce système de valeurs, l’univers quotidien des humains est, par définition, dominé par l’ignorance.

9La profondeur de l’antagonisme charrié par l’histoire de nos systèmes universitaires apparaît dans sa simple évidence : d’un côté, la formation intellectuelle mène à la contemplation du vrai tandis que les activités professionnelles en détournent. Pour les familiers de la pensée de la philosophe Hannah Arendt, disons que l’université appartient au monde de ce qu’elle appelle la vita contemplativa tandis que les métiers appartiennent au monde de la vita activa (Arendt 1998 [1958] : 12-17). Cette dichotomie marque la vie universitaire occidentale depuis ses origines et fait de la vita activa la première ennemie de la connaissance.

10Dans le contexte ainsi décrit, il n’est pas vain de s’intéresser aux premiers établissements d’enseignement supérieur qui ont eu l’audace étonnante de se consacrer aux savoirs de la caverne et non à la Connaissance acquise en dehors. Leur cheminement pourra nous inspirer. Dans le contexte français, les grandes écoles créées par la Révolution française se sont mises au service de la vita activa et non de la contemplation du vrai. Au fond, les révolutionnaires se trouvaient confrontés à un problème qui n’est pas si éloigné de la question que pose cet article : comment doter rapidement la nation de responsables d’encadrement formés aux lumières de la science moderne alors même que les grandes universités du XVIIIe siècle transmettaient un savoir largement déconnecté des réalités de leur temps et qu’elles refusaient en tout cas de le placer au service des activités humaines ? Il fallait alors des enseignants pour éclairer les citoyens de la république, des ingénieurs pour les armées, les manufactures, les routes, les ponts et les chaussées. Les révolutionnaires choisirent d’ignorer les universités traditionnelles au bénéfice de quelques établissements qui existaient déjà et ils en créèrent de nouveaux, souvent à partir de rien, pour parvenir à leurs fins. Afin d’affirmer que ces écoles étaient égales en dignité aux universités, beaucoup ont été qualifiées de « supérieures » à cette époque.

11Il reste néanmoins que la construction du savoir universitaire s’est longtemps fondée sur un refus de la vita activa car elle était perçue comme un obstacle à l’acquisition de la vraie connaissance. En mai 1968, nos universités révoltées n’avaient pas encore tourné cette page multiséculaire. Il a fallu les deux grandes crises pétrolières des années 1970 et la montée inexorable du chômage de masse au cours des trente dernières années pour que l’ensemble de la société mobilise toutes ses énergies afin de mieux préparer ses jeunes au marché du travail et que les universités reçoivent parmi leurs missions l’insertion professionnelle de leurs étudiants. L’évolution est très récente, néanmoins, et nous connaissons tous des collègues pour lesquels cette vocation nouvelle ne va pas de soi.

1.2. Les langues, la vita activa et la mission peu explicite du secteur LANSAD

  • 2 Parmi les promoteurs et les diffuseurs de l’appellation LANSAD figurent, entre autres, Michel Perri (...)

12C’est au cours de cette grande mutation du système universitaire, encore largement inachevée, de la vita contemplativa à la vita activa, que les langues se sont trouvées associées à des savoirs et à des activités non linguistiques dans le cadre de l’enseignement supérieur. À partir des années 1970 et 1980, des cursus universitaires, dont dès leurs débuts ceux des IUT, ont compris des horaires destinés aux langues. Ces formations ont souvent d’abord été optionnelles puis de plus en plus fréquemment obligatoires et progressivement inscrites dans les maquettes des diplômes. Il s’est ainsi développé un secteur immense et en expansion rapide où les langues sont enseignées en dehors des départements qui forment des linguistes. En 1993, Michel Perrin (Mémet 2001 : 312), suivi de quelques collègues qui y sont alors impliqués, propose l’acronyme secteur « LANSAD/Langues pour spécialistes d’autres disciplines ». Leur objectif est d’éviter l’appellation « enseignement des langues aux non-spécialistes » qui paraissait réductrice et négative2.

13Toutefois, si nous nous interrogeons sur le projet pédagogique précis qui motivait cette entrée des langues dans le supérieur, nous n’obtenons pas de réponse détaillée. De façon diffuse, la mondialisation en cours et l’intensification des échanges ont mis en évidence la dimension communicationnelle des langues. Il fallait des langues à un monde de la vie active de plus en plus « communiquant », mais, hormis dans certaines formations telles que celles dispensées dans les départements d’informatique des IUT, les responsables pédagogiques des formations ne savaient pas exactement ce qu’ils devaient en attendre.

14Par elle-même, cette puissante expansion des langues en dehors de leurs départements d’origine s’inscrivait dans une orientation communicationnelle mais n’apportait pas un gage automatique de professionnalisation des formations. Les collègues LANSAD recevaient (et dans bien des cas reçoivent toujours) pour intitulé de leur mission : « langues vivantes : deux heures par semaine ». Que mettre sous ce libellé ? Quels contenus, quelles méthodes, quels objectifs ? Personne ne le sait précisément ; il incombe souvent aux enseignants LANSAD de définir leur propre mission.

  • 3 Les Cahiers de l’APLIUT, Vol. XXVII N° 1, Février 2008. Numéro spécial « LEA/LANSAD Convergences/Di (...)

15L’une des rares formations de langue à destination professionnelle non linguistique dont les contenus ont été explicitement précisés est celle des Langues étrangères appliquées (LEA). Les synergies entre les LEA et le LANSAD sont nombreuses3, mais les LEA ne sont pas assimilables au LANSAD car elles restent des formations de langues et parce que les domaines professionnels auxquels elles sont appliquées sont assez divers et n’aboutissent pas à une formation en langues de spécialité.

  • 4 Sur ce point, les IUT ont l’avantage d’être étroitement impliqués dans la définition des PPN (progr (...)

16Pour la très grande majorité des collègues nommés en LANSAD4, le contrat pédagogique qui se présente encore à eux évoque largement une tabula rasa. Il leur revient souvent d’inventer les différents aspects de leur acte pédagogique, avec les avantages et les inconvénients de cette liberté quasi totale. Dans ces conditions, cette puissante exigence d’inventivité secondée par la liberté est à l’origine d’un authentique foisonnement d’expérimentations et d’innovations dans le secteur LANSAD au cours des trente dernières années. Sans prétendre à l’exhaustivité, il faut prendre la mesure de ces scénarios mobilisés pour rapprocher l’enseignement des langues et la professionnalisation.

2. Scénarios mobilisés pour rapprocher l’enseignement des langues et la professionnalisation dans le secteur LANSAD : avancées et insuffisances

2.1. Les avancées

17Rares ont sans doute été les périodes de l’histoire pédagogique des langues où plus d’expériences nouvelles ont été lancées qu’au cours de ces trois dernières décennies dans le secteur LANSAD. Sa liberté pédagogique intrinsèque en a fait un terreau particulièrement accueillant pour les innovations dont quelques développements parmi les plus significatifs sont ici évoqués.

2.1.1. Expériences et innovations

18Au cours de cette période, les relations enseignants-apprenants y ont été reconsidérées, notamment grâce aux approches socioconstructivistes où les apprenants élaborent leurs propres connaissances par l’échange et le partage. Des dizaines de démarches nouvelles ont été pratiquées et étudiées. Citons, entre autres exemples, le Data-driven-learning (DDL) – l’apprentissage par l’exploitation de corpus de données en langues disponibles sur Internet (Landure & Boulton 2010) – ou le Online Informal Learning of English (OILE) – l’apprentissage par exposition informelle à des programmes grand public consultables en ligne (Kusik & Sockett 2012).

19Bon nombre de ces avancées reposent sur une mobilisation sans cesse croissante de l’analyse de corpus en expansion constante en LANSAD. En effet, les supports et les ressources en langues se sont considérablement étoffés et diversifiés, notamment grâce au multimédia et, au premier chef, à Internet. Rappelons que c’est au cours de cette époque que se multiplient les centres de langues et qu’est fondée l’association RANACLES qui les fédère – encore une initiative des pionniers de l’APLIUT et du GERAS (Perrin 2008 : 19-20).

20La problématique de « l’Enseignement d’une matière intégré à une langue étrangère » appelée EMILE en français et CLIL en anglais (Content and Language Integrated Learning) a également été appliquée en LANSAD (Taillefer 2013).

21Certains spécialistes de didactique y mettent en place des programmes fondés sur les tâches en rapport avec les spécialités étudiées (Whyte 2013). Ces tâches – dites macro-tâches ou micro-tâches selon leur ampleur – occupent une position centrale dans le Cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL ou Cadre). Le secteur LANSAD est particulièrement sensible aux apports du CECRL parce que les notions de compétences et de tâches sur lesquelles le Cadre est fondé sont, au fond, les mêmes que celles sur lesquelles s’articulent les pratiques professionnelles (Fries 2009).

  • 5 Les Cahiers de l’APLIUT, Vol. XXXI N° 3, octobre 2012. « La certification en langues – État des lie (...)

22Le LANSAD est aussi par excellence le territoire où se développent les certifications en langues : le TOEFL et le TOEIC pour l’anglais, rejoints par le CLES (en onze langues) dans les années 2000 et de nombreuses autres certifications pour l’allemand, l’espagnol, l’italien… Les certifications en langues spécialisées sont encore très rares – le CLES 3 amorce une évolution dans ce sens – mais l’expansion fulgurante des certifications en langues ces dernières années illustre les besoins linguistiques croissants du monde professionnel à qui ces attestations sont surtout destinées5.

2.1.2. Le cas particulier de l’ESP (English for Specific Purposes)

23Parmi tous ces scénarios, il convient ici d’accorder une attention particulière à l’ESP, démarche d’origine anglo-américaine (« apprentissage des langues sur objectifs spécifiques » en français). L’ESP s’est construit et diffusé assez rapidement à la suite de la deuxième guerre mondiale, notamment à partir des années 1960 lorsque de nombreux pays en voie de développement ont eu besoin de l’anglais pour accéder aux sciences et aux techniques modernes.

24De façon globale, l’ESP se définit comme une démarche d’enseignement des langues (an approach to language teaching) centrée sur l’apprenant (elle est souvent décrite comme a learner-centred approach) et découlant de ses besoins (Hutchinson & Waters 1987 : 19 ; Dudley-Evans & St John 1998 : 1, 230). Chaque programme d’ESP mobilise au préalable une analyse des besoins (needs analysis) qui détermine les contenus et la manière d’apprendre les mieux adaptés. L’ESP a été rapidement décliné en diverses spécialités et il existe un English for Medical Purposes (pour les professions médicales), un English for Academic Purposes (pour les études universitaires), un English for Business Purposes pour le commerce et les affaires, et ainsi de suite (Dudley-Evans & St John 1998 : 6).

25Les praticiens français des LSP ont découvert l’ESP dans les années 1980 et ont été frappés par le renversement logique qu’il effectue en plaçant l’apprenant et ses besoins à l’origine de l’acte pédagogique au lieu de la langue. Ils y ont vu une contribution majeure à la professionnalisation par le biais des langues et Anne Azam-Pradeilles évoque « une véritable révolution copernicienne » (Azam-Pradeilles 2008 : 11). De fait, dans le domaine de l’anglais du moins, l’ESP s’est imposé comme la façon la plus diffusée de concevoir l’apprentissage des langues et il exerce dans le monde entier une influence considérable.

2.2. Les insuffisances

26Depuis une trentaine d’années donc, le LANSAD est un forum très actif d’échanges, d’expérimentations et d’innovations. Néanmoins, ces avancées incontestables ne doivent pas occulter l’immensité des problèmes qui restent non résolus. En bref, beaucoup a déjà été accompli en LANSAD mais, d’une certaine façon, tout reste à faire et il importe de mesurer l’ampleur des chantiers qui doivent être engagés.

2.2.1. L’ambiguïté LANSAD/LSP

27En dépit du foisonnement d’initiatives qui s’y sont développées, le LANSAD reste un territoire pédagogique immense aux contours imprécis et aux caractéristiques extrêmement hétérogènes. L’appellation LANSAD confère au secteur une apparence d’unité sans que celle-ci soit relayée par des facteurs unificateurs identifiables. Parce qu’à l’origine l’appellation LANSAD a été portée par des enseignants de LSP, le secteur est souvent perçu comme s’il était par nature fédéré par elles. Cette présentation est largement exagérée et, dans de nombreux cas, l’adéquation LANSAD/LSP est totalement inexistante. Certains cursus adossent une langue à des formations disciplinaires sans que l’on y enseigne la langue de spécialité correspondante. D’autres dispensent des cours de langues à des étudiants de disciplines différentes réunis dans les mêmes groupes. Dans ces situations, très fréquentes en sciences humaines, la notion de LSP disparaît. En outre, dans de multiples cursus LANSAD, les certifications pallient l’absence de programme en langue ; les cours se réduisent à un service minimum consacré à la préparation au TOEIC ou au CLES qui certifient en langue générale.

28L’assimilation abusive du LANSAD aux LSP devenant source de nombreuses confusions, le GERAS a encouragé la Commission formation de la SAES à travailler sur le secteur LANSAD et sur son objet d’étude. Un texte émanant de cette commission a été publié sur le site de la SAES en 2011 (Commission formation de la SAES 2011).

2.2.2. Les linguistes et le LANSAD

  • 6 IAE : institut d’administration des entreprises. IEP : institut d’études politiques.

29L’hétérogénéité caractéristique du LANSAD découle également des relations entre les enseignants de langues et le secteur. Pour leur part, les IUT, les écoles de commerce et d’ingénieurs, les IAE et les IEP6 disposent souvent d’un quota minimal de titulaires garants de stabilité pédagogique. En revanche, dans les universités, de nombreuses formations LANSAD sont assurées par une majorité de vacataires qui manquent de moyens pour structurer les formations. Par ailleurs, lorsque les linguistes titulaires ont le choix de leur évolution professionnelle, ils ne se dirigent vers les LEA ou le LANSAD que par défaut. Ces secteurs sont faiblement investis dans la recherche, les doctorats y sont donc rares et les carrières peinent à y progresser.

30Ces circonstances contribuent à faire du secteur la portion déshéritée de l’enseignement des langues. L’ambiance qui y règne reflète le complexe d’infériorité latent de bon nombre de ses enseignants car ils souffrent d’un double déficit d’estime. D’abord, ils se sentent infériorisés parce que leur discipline a généralement un statut secondaire par rapport aux disciplines de spécialité. Ensuite, ils se trouvent également en situation défavorable par rapport à leurs collègues des départements de langues qui se présentent la plupart du temps comme les « vrais linguistes ».

2.2.3. Le LANSAD : une demande sans offre

31Évidemment, ces aspects affectifs de la question méritent qu’on s’y attache, mais ils ne sont eux-mêmes que les conséquences de problèmes beaucoup plus profonds qui exigent une analyse détaillée. La question initialement posée, « comment les langues de spécialité peuvent-elles contribuer à la professionnalisation ? », peut porter sur l’offre de formation à proposer maintenant à nos étudiants. Toutefois, dans la perspective adoptée par cet article, aucune réponse immédiate à la question ne sera tenue comme durablement satisfaisante tant que le LANSAD n’aura pas résolu son problème structurel le plus grave : il ne parvient pas à former ses nouvelles générations d’enseignants.

32D’ordinaire, il est admis que les générations se succèdent tous les vingt ans environ. Or, le LANSAD existe depuis plus de trente ans et il traverse en ce moment une période de renouvellement accéléré de ses effectifs. Pourtant, la formation de la génération montante des enseignants LANSAD reste totalement à entreprendre. Certes, de multiples formes de mutualisation des avancées réalisées sont disponibles, comme les revues Les Cahiers de l’APLIUT et ASp qui paraissent depuis les années 1980-90. Il va de soi que l’accumulation des expériences en LANSAD est considérable mais, par lui-même, ce potentiel ne peut assurer la formation de nos successeurs parce que la plus grande partie de cet héritage reste éparpillée dans nos articles, nos publications, nos souvenirs et notre vécu. Elle n’a pas encore été structurée en un corps de connaissances transmissible et elle s’oublie rapidement au fur et à mesure qu’elle se crée. De ce point de vue, nos acquis ressemblent aux innombrables pièces d’un puzzle énorme dont nous ignorons l’image finale. Il faut se réjouir qu’il ait existé un master d’anglais de spécialité à l’Université Bordeaux 2 et qu’il en existe un à l’École normale supérieure de Cachan et à l’Université du Havre. Ces formations répondent précisément aux besoins qualitatifs du LANSAD en LSP – il s’agit ici d’anglais de spécialité (ASP) – mais elles restent infiniment en deçà des exigences quantitatives du secteur.

33À cet égard, il est illusoire de fonder quelque espoir sur nos départements de langues pour former nos enseignants. Ils restent marqués par la tradition platonicienne des universités qui a déjà été évoquée : ils contemplent l’essence des langues à travers le prisme des grandes œuvres et des grands auteurs. Ils y ont ajouté ces trente dernières années, et souvent à contrecœur, la civilisation et la linguistique, mais ils restent encore en grande partie réfractaires aux langues de spécialité et au secteur LANSAD (Baïssus 2008 : 7).

34Tout indique que le LANSAD et les LEA – dans une large mesure, les LEA font face à des difficultés similaires – représentent des demandes sans offre du fait de notre incapacité à former les jeunes enseignants dont ils ont besoin. La crise de l’inadéquation entre l’offre et la demande se révèle lors des recrutements par les comités de sélection. En général, 90 % des candidatures sont hors profil. Au cours des cinq dernières années, les LEA et le LANSAD sont devenus des recruteurs de linguistes plus dynamiques que les départements de langues, mais ils ne trouvent pas les candidats offrant les compétences qui leur sont nécessaires. La situation est préoccupante parce que les responsables du secteur ne peuvent puiser dans leurs propres forces les solutions à leurs problèmes mais également parce que, d’une certaine manière, ces problèmes résultent de choix qu’ils ont eux-mêmes effectués.

2.2.4. Les limites de l’ESP

35Dans cette perspective, le cas de l’ESP apparaît comme emblématique de ces insuffisances auto-créées, dans la mesure où les solutions précieuses qu’il nous apporte au cas par cas se révèlent handicapantes à long terme. Trois aspects de la question sont successivement examinés.

36Premièrement, il convient de se pencher sur le fond de la démarche ESP proprement dite. Son nom indique que l’English for Specific Purposes n’est pas déterminé par une « spécialité », mais par un « purpose ». Le mot purpose vient du français « propos », qui découle lui-même du latin « propositum » (« ce qui est posé devant », pro-positum), c’est-à-dire, ce que l’on se propose de faire. Même lorsqu’il est précisé medical purposes ou business purposes, ce sont les objectifs qui sont médicaux ou économiques et non la langue. Dans l’ESP, la notion de « langue de spécialité » n’est pas clairement fondée dans l’appellation.

37En outre, dans l’ESP, les purposes – les objectifs pédagogiques envisageables – sont aussi nombreux et aussi divers que les publics d’apprenants. Cette diversité étant potentiellement infinie, l’expérience accumulée ici pour les uns ne vaut pas nécessairement là-bas pour les autres. Plus les objectifs sont finement détaillés moins ils sont mutualisables et généralisables. Il apparaît donc que le savoir ainsi mobilisé dans l’ESP reste éparpillé en une multitude de purposes qu’il est malaisé de fédérer en un corps de connaissances transmissible d’une génération à l’autre. Ce sont des pièces d’expérience qui, bien évidemment, enrichissent notre puzzle, mais qui ne nous aident pas à le construire comme un ensemble de savoirs.

38Deuxièmement, il convient de remettre en perspective l’analyse des besoins (needs analysis), point de départ de toute démarche de l’ESP ; une étude précise des besoins des apprenants doit être conduite pour déterminer les contenus, la manière de les enseigner et donc le programme le mieux adapté au public considéré. Cette posture centrée sur l’apprenant est très louable, mais l’analyse des besoins a pris dans l’ESP une importance qui peut sembler excessive. Il est apparemment impossible d’enseigner en langue de spécialité sans passer par cette étape obligée, alors que l’expérience montre qu’elle ne garantit pas toujours la pertinence des choix pédagogiques.

39En effet, si la posture peut se justifier lorsque la langue de spécialité n’est pas une langue étrangère, elle ne va pas invariablement de soi lorsque c’est le cas parce que les apprenants n’ont pas toujours une connaissance claire et juste de leurs besoins en langues de spécialité étrangères. Ils en ont souvent une connaissance adéquate dans les domaines des sciences exactes ou expérimentales qui ont une vocation universelle et où il n’existe pas de différence entre le spécialisé américain, japonais, français ou russe. Dans ces conditions, les apprenants sont partout chez eux dans le domaine et ils cherchent en langue étrangère des équivalences ou des symétries de savoirs qui leur sont déjà familiers. En revanche, lorsque le spécialisé n’a pas de vocation universelle, les apprenants peinent à exprimer des besoins pertinents.

40Par exemple, si un enseignant d’anglais analyse les besoins d’étudiants en comptabilité, la réponse la plus probable est qu’ils veulent apprendre les différents éléments du « plan comptable général » en anglais. Or, les comptables anglophones n’utilisent pas de plan comptable et donc l’analyse des besoins manque ici de pertinence. Le besoin des étudiants porte sur un domaine qui n’est pas universel et il doit être reformulé par l’enseignant en fonction des caractéristiques du domaine spécialisé en contexte anglophone et non en fonction de leurs attentes. Des situations similaires sont fréquentes en droit car les différences entre le droit français et le droit de la common law de tradition anglo-saxonne sont très profondes. Toutes les spécificités nationales, culturelles et institutionnelles qui interviennent dans les domaines spécialisés non universels relativisent le rôle que peut jouer l’analyse des besoins des apprenants et redonnent leur importance aux compétences de l’enseignant qui maîtrise mieux qu’eux le spécialisé en contexte étranger.

41Troisièmement, le problème de la dimension temporelle propre à l’approche ESP est rarement soulevé. Il occupe néanmoins une place cruciale dans la problématique de la transmission des connaissances en langues de spécialité. Une démarche pédagogique prioritairement fondée sur les besoins des apprenants privilégie leurs besoins actuels et rarement leurs besoins futurs et leurs besoins passés. C’est l’un des atouts remarquables de l’ESP : la démarche répond aux exigences de l’actualité. En revanche, son défaut réside dans sa propension à cantonner l’expérience pédagogique à la sphère synchronique. La conséquence est que le savoir ainsi construit est difficile à transmettre parce qu’il a une faible épaisseur historique et que, par là-même, il tend à échapper à la mémoire.

42Or, l’ESP se soucie peu de l’histoire et ignore la diachronie. Le monopole préoccupant de la synchronie en ESP a été signalé de longue date. En 1983, en célébrant les vingt ans d’existence de l’ESP, John Swales, qui est devenu une autorité internationale dans l’analyse des genres, le déplorait et le mettait clairement en relation avec le problème de la transmission des savoirs sur lequel cet article insiste maintenant :

  • 7 Yet, despite 20 years’ work in ESP and despite the large number of description and discussion of it (...)

Pourtant, malgré vingt ans de travail en ESP, et malgré un grand nombre de descriptions de sa théorie et de sa pratique, les praticiens de l’ESP ont tendance à ignorer le passé. Ils s’intéressent au « ici » et au « maintenant » de leur propre situation de travail. En général, ils ne regardent pas à côté pour voir ce que font d’autres collègues dans des situations identiques et ils ne regardent pas en arrière pour voir ce que d’autres ont fait dans des situations similaires ou différentes. (Swales 1985 : 2 ; ma traduction)7

43Cette citation est précieuse parce qu’elle illustre parfaitement les dangers du monopole synchronique, mais également l’éparpillement des situations d’enseignement qui fait obstacle à leur mutualisation. Le diagnostic de J. Swales sur l’ESP est toujours pertinent aujourd’hui et il est également applicable au secteur LANSAD. Il décrit très clairement la pulvérisation des pratiques et la quasi-impossibilité de les constituer en un corps de connaissances transmissible.

2.2.5. Les implications pour la recherche

44Les trois limites de l’ESP qui viennent d’être identifiées pèsent sur l’enseignement dans le secteur LANSAD, mais également sur la recherche en LSP : celle-ci ne parvient pas à construire un savoir structuré et transmissible aux futurs enseignants du domaine. En effet, fonder l’étude des langues de spécialité sur les objectifs et les besoins de l’ici et du maintenant interdit la constitution d’objets linguistiques stables car ils sont toujours soumis aux contingences pédagogiques du moment.

45Dans la logique de l’ESP, il n’y a pas de langue de spécialité, mais « de l’anglais » « pour » des objectifs spécifiques. C’est pourquoi, les avancées de la recherche en LSP, quoique très riches, présentent le défaut majeur du particularisme. Elles portent sur les pièces du puzzle, mais quasiment jamais sur le puzzle lui-même.

46Pour faire du puzzle un tout cohérent, il convient de fonder les langues de spécialité sur ce qui constitue leur noyau central et stable et non sur les conditions passagères de tel ou tel apprentissage. Il est proposé que ce noyau central et stable ne puisse être que l’intersection entre une langue et un domaine spécialisé. En effet, dans l’appellation française « langue de spécialité », cette intersection se trouve clairement matérialisée par le « de » : anglais de la médecine, allemand du droit… Le « de » exprime la relation durable établie entre les deux éléments et elle apporte sa robustesse à leur intersection. En revanche, le « for » (dans for specific purposes) ou le « sur » de « sur objectifs spécifiques » établissent des relations plus fragiles car plus occasionnelles. C’est à cette intersection qu’il faut donner un statut scientifique grâce à une définition simple et claire.

2.2.6. S’approprier le spécialisé au lieu de l’ignorer

47Néanmoins, avant de procéder à cette fondation, un point mérite d’être clarifié. L’intersection qui vient d’être signalée comporte deux éléments. Or si la nature du premier – les langues – est familière aux linguistes, la nature du second – le spécialisé non linguistique, qu’il soit disciplinaire ou professionnel – leur est encore largement étranger. En effet, dans une grande mesure, les linguistes n’ont pas encore totalement intégré le spécialisé dans leur vision épistémologique des LSP.

48De très nombreuses études ont d’ailleurs été menées sur les caractéristiques « transversales » des LSP, c’est-à-dire sur celles qu’elles partagent avec d’autres : les discours, le style, les registres, les genres, la fiction à substrat professionnel (FASP)... En revanche, les études pour ainsi dire « verticales », c’est-à-dire portant sur l’objet même des langues de spécialité – l’intersection entre la langue et le spécialisé, telle que l’anglais et le droit ou la médecine – restent rares.

  • 8 Master LLCE Spécialité études anglophones – Anglais pour le secteur LANSAD (didactique de l’anglais (...)
  • 9 Master – Études anglophones ; spécialité Anglais de spécialité : culture et traductions spécialisée (...)

49Les masters en anglais de spécialité de l’Université du Havre8 et de l’ENS Cachan9, bien que très précieux pour les LSP et le LANSAD, présentent précisément cette limite. Ce sont des masters d’ASP « généralistes » en ce sens qu’ils ne forment à aucune variété professionnelle de la langue mais préparent aux exigences générales de l’ASP. Le progrès est déjà remarquable, mais l’initiation à une intersection langue/spécialité précise n’est pas proposée et le paradoxe de l’apprentissage d’un anglais de spécialité à vocation générale n’est pas totalement levé.

50De nombreux collègues justifient d’ailleurs ouvertement leur refus d’embrasser le spécialisé, notamment les Anglo-Saxons de l’ESP. Ils se positionnent comme linguistes avant tout, et non comme médecins, comptables, juristes, banquiers ou ingénieurs. À leurs yeux, prétendre maîtriser un peu de ces spécialités équivaudrait à usurper un métier qui n’est pas le leur. Le point de vue adopté dans cet article est diamétralement opposé. L’autolimitation par le linguiste de spécialité de ses compétences relatives au domaine spécialisé semble totalement injustifiée. Cette position reviendrait à vouloir enseigner les pièces de Shakespeare tout en s’interdisant de connaître l’homme, sa vie, son œuvre et son époque au prétexte qu’on aurait ainsi l’intention de devenir Shakespeare lui-même. En effet, de ce point de vue, les langues de spécialité ne relèvent pas d’une logique distincte de celle d’autres disciplines telles la littérature ou la civilisation. On n’attend pas d’un spécialiste du théâtre élisabéthain qu’il rivalise avec Ben Johnson en écrivant des pièces dans le style de cette époque, ni d’un américaniste spécialiste du système politique des États-Unis qu’il se présente aux élections de ce pays pour y être élu sénateur ou gouverneur. Comme en LSP, leurs connaissances ne les conduisent pas à prendre indûment la place des professionnels de leur spécialité, mais de bien enseigner ces domaines.

51Au terme de cet état des lieux des LSP en LANSAD, le problème de la contribution des langues à la professionnalisation des apprenants s’apparente au fond à la situation des révolutionnaires de 1789 évoquée plus haut. Les futurs cadres pédagogiques du secteur doivent être formés alors qu’au sein de l’environnement universitaire actuel les moyens font défaut pour y parvenir. La réponse radicale des premiers républicains inspire un mode opératoire équivalent. Il faut envisager de mettre en place une offre de formation entièrement nouvelle, ce qui implique préalablement de refonder la recherche en LSP. Les différentes étapes de cette proposition sont regroupées dans le parcours « recommandé » présenté dans la troisième partie.

3. Parcours recommandé pour que les langues contribuent efficacement à la professionnalisation des étudiants LANSAD

3.1. Les étapes du parcours et l’ordre des priorités

52Afin de se faire une idée globale de la tâche à accomplir, une première démarche consiste à tracer les grandes lignes du parcours annoncé en partant des objectifs finaux pour remonter aux étapes nécessaires pour les atteindre.

  • Il est souhaité, in fine, que les langues contribuent efficacement à la professionnalisation des apprenants. Il importe donc que tous les étudiants LANSAD soient formés à communiquer en langue étrangère dans la perspective professionnelle de la carrière qu’ils ont choisie, c’est-à-dire qu’ils étudient la langue de spécialité de leur domaine de formation. Il faut donc généraliser l’apprentissage des langues de spécialité en LANSAD. Dans un éditorial de la revue ASp de mars 2010, son rédacteur en chef appelait les lecteurs à « spécialiser le secteur LANSAD » (Van der Yeught 2010 : 9). Ce mot d’ordre est plus d’actualité que jamais.

  • Cet objectif ne pourra être atteint que si des enseignants LANSAD sont massivement formés à ces variétés spécialisées des langues. À cette fin, il est nécessaire de constituer les corps de connaissances pertinents afin de les leur transmettre, entreprise qui implique que les langues de spécialité soient fondées en tant que domaines consacrés à l’étude de ces objets scientifiquement définis et décrits.

  • Ces objets de savoir s’inscrivent nécessairement dans les sciences humaines et il faut donc qu’ils soient pensés dans la dimension du temps humain. En d’autres termes, ils doivent être dotés d’une histoire et il convient qu’une dimension diachronique soit intégrée à leur description. Cette démarche est encore largement inédite en LSP et en ESP.

53L’ordre des actions à engager a son importance. Le parcours commence par la recherche qui a pour tâche de constituer les objets à étudier, c’est-à-dire, dans ce cas, d’identifier et de décrire les variétés spécialisées des langues pertinentes en LANSAD. Il se poursuit par le travail institutionnel et pédagogique qui se fonde sur les acquis de la recherche pour mettre sur pied les formations adaptées aux futurs enseignants et enseignants-chercheurs du LANSAD. La stratégie ainsi préconisée se traduira par un chantier scientifique et logistique de grande ampleur qui se trouvera sans cesse renouvelé au fur et à mesure que les langues et les domaines évolueront. C’est la raison pour laquelle il doit être lancé sans tarder. S’il n’est pas rapidement engagé, le LANSAD manquera encore dans trente ans des enseignants formés dont il a besoin.

  • 10 Au sein de cette collection, chaque variété spécialisée d’une langue fait l’objet d’un ouvrage de r (...)

54Ce programme d’action ne fait pas encore l’objet d’un large consensus au sein des communautés du LANSAD et des LSP. Néanmoins, le partenariat établi en 2012 par le GERAS, les éditions Ophrys et le laboratoire LERMA de l’Université d’Aix-Marseille pour publier une collection « Langues de spécialité » constitue une avancée concrète et significative dans cette direction. L’objectif du projet éditorial est de décrire méthodiquement les variétés spécialisées des langues du LANSAD afin de mettre ces connaissances au service des enseignants et des enseignants-chercheurs du secteur. Il s’agit là de l’étape scientifique initiale indispensable au bon déroulement du parcours10.

3.2. Le premier travail de la recherche : l’effort de définition

55Construire les objets de connaissance identifiés par le parcours exige de la part de la recherche en LSP un effort intensif de définitions car l’encadrement théorique du domaine reste encore entièrement à construire. En 2002, Michel Petit avait proposé, pour la première fois dans la communauté angliciste, une définition de l’ASP : « L’anglais de spécialité est la branche de l’anglistique qui traite de la langue, du discours et de la culture des communautés professionnelles et groupes sociaux spécialisés anglophones et de l’enseignement de cet objet » (Petit 2002 : 2-3). La définition ne caractérisait pas l’ASP en tant qu’objet mais en tant que discipline branche de l’anglistique. Toutefois, elle suggérait de façon inédite qu’il existe un « objet » anglais de spécialité et qu’il présente trois facettes : langue, discours et culture.

56En 2011, le GERAS a proposé à la Commission formation de la SAES une définition des langues de spécialité et de l’ASP considérés en tant qu’objets (Commission formation de la SAES 2011).

  • Langues de spécialité – Une langue de spécialité est l’expression d’un domaine spécialisé dans une langue.

  • Anglais de spécialité – Une variété spécialisée de l’anglais (souvent appelé « langue de spécialité » par commodité) est l’expression d’un domaine spécialisé dans cette langue.

57Définir une LSP comme « l’expression » d’un domaine spécialisé dans la langue précise la relation d’intersection entre la langue et le spécialisé évoquée supra (cf. section 2.2.5.). La définition donne un statut linguistique au spécialisé et pose la langue comme un objet stable à décrire et à étudier. Cet objet présente également une origine et une évolution dans le temps humain, c’est-à-dire une histoire dont une étude diachronique doit rendre compte.

58Les efforts de définition déjà entrepris ont porté sur les notions suivantes : domaine spécialisé, communauté spécialisée, communauté spécialisée linguistique, communauté spécialisée nationale, civilisation, valeur civilisationnelle a priori d’une LSP, valeur civilisationnelle a posteriori d’une LSP (Van der Yeught 2012 : 13-21).

3.3. L’effort de description

59Une fois qu’un cadre théorique minimal a été posé, les objets du domaine peuvent être étudiés. Afin de prendre conscience de ce qu’ils sont, il faut préalablement les décrire. À cet égard, l’apport de la définition de 2002 proposée par M. Petit peut être combiné aux définitions plus récentes pour déterminer un protocole de description des LSP. Parce que le spécialisé peut s’exprimer (1) dans la langue elle-même, (2) dans les discours spécialisés qu’elle produit et (3) dans la culture qu’elle véhicule, les LSP peuvent être décrites selon un protocole tripartite « langue – discours – culture ». Dans la première description proposée, chacun de ces trois moments descriptifs est appelé « approche » (linguistique, discursive et culturelle) et les approches se regroupent en une « démarche » descriptive générale qui vise à aboutir à un profil spécifique de la langue, c’est-à-dire à une synthèse de ses caractéristiques propres (Van der Yeught 2012 : 16, 273-275).

60La description comprend nécessairement une étude diachronique de la langue, notamment de ses origines et de ses évolutions significatives. Plus particulièrement, les premiers processus de dictionnarisation qui signalent l’émergence d’une langue de spécialité doivent être étudiés en détail. Le pontage du spécialisé au non spécialisé effectué par les premiers dictionnaires atteste du moment historique où la langue spécialisée se sépare de la langue générale et apparaît en tant que phénomène linguistique identifiable comme objet par le chercheur et transmissible par le pédagogue (Van der Yeught 2012 : 17-19).

3.4. Imaginer de nouvelles modalités de transmission des connaissances en LSP : les masters en langues étrangères spécialisées (LES)

61La description méthodique des LSP par la recherche constituera un corps structuré de connaissances qui sera mis à la disposition des futurs praticiens du LANSAD. Les instances institutionnelles et pédagogiques prendront le relais pour traduire ces résultats en programmes de formation adaptés. Aucun cursus de ce type n’existant encore, il conviendra sans doute de les inventer de toutes pièces. Il peut être imaginé des masters spécifiques appelés LES (langues étrangères spécialisées) sur le modèle des LEA (langues étrangères appliquées). À la différence des masters en anglais de spécialité passés et existants, les masters LES ne formeront pas aux langues de spécialité « en général », mais à des langues de spécialité spécifiques telles que l’anglais de la médecine ou l’allemand du droit. Les titulaires de diplômes en LES deviendront des « spécialistes d’une langue de spécialité » et ils seront directement opérationnels dans le secteur LANSAD. Ils pourront s’y porter candidats en présentant les compétences attendues par le profil des postes. La demande LANSAD rencontrera enfin une offre adaptée à ses attentes.

62Les maquettes de ces masters nouveaux ne pourront être fondées que sur des connaissances scientifiques apportées par la recherche. C’est pourquoi la structuration de la recherche en LSP est un préalable indispensable à toute avancée en LANSAD. Les limitations de l’ESP, notamment dans la formation de ses enseignants, découlent de sa faiblesse structurelle en recherche fondamentale.

63Dans l’ensemble, les masters LES proposeront une formation générale à la langue naturelle dans la perspective du spécialisé, mais également une initiation assez poussée à ce qui, dans le domaine spécialisé, s’exprime dans la langue. De ce point de vue, les linguistes de spécialité doivent passer outre le soupçon d’usurper les métiers non linguistiques. Tous les domaines sont égaux en dignité et les LSP n’ont aucun complexe à nourrir par rapport à ce que les autres branches de l’apprentissage des langues se permettent légitimement. À l’instar d’un linguiste littéraire ou civilisationniste, un spécialiste de LSP peut approfondir en toute légitimité ses connaissances en droit ou en médecine sans être suspecté de vouloir se substituer aux juristes ou aux médecins. Ce sont même ces connaissances qui lui permettront de contribuer à une meilleure professionnalisation de ses apprenants par la langue.

64D’ailleurs, une formation assez solide dans les domaines spécialisés sera rapidement exigée pour les linguistes par la généralisation du dispositif « licence–master–doctorat » (LMD) engagée en Europe au cours des années 2000. Pour répondre aux besoins de plus en plus « pointus » des étudiants en master, des doctorants et des chercheurs, la demande en linguistes LANSAD va encore augmenter quantitativement, mais elle se doublera également d’une exigence qualitative de plus en plus élevée. Les masters LES devront intégrer à leurs formations des compétences d’aide à la rédaction d’articles de recherche en langues étrangères et aux communications scientifiques.

65À ce stade avancé de la réalisation du parcours, certains linguistes formés par les LES choisiront d’y exercer afin de participer à la formation de leurs successeurs. Ces sections ne limiteront donc pas leurs fonctions à pourvoir le secteur LANSAD en pédagogues. Elles joueront également un rôle de vivier pour les futurs chercheurs en LSP qui souhaiteraient s’engager dans une thèse de doctorat. Elles auront donc vocation à collaborer avec des laboratoires de recherche étroitement impliqués dans ces domaines.

Conclusion

66La professionnalisation par les langues s’inscrit dans un environnement universitaire structurellement réfractaire, jusqu’à un passé récent, aux missions de professionnalisation. Néanmoins, à partir des années 1970, les langues ont été massivement introduites dans les formations non linguistiques, évolution qui a conduit à l’expansion du secteur LANSAD. Malgré de très nombreuses initiatives et innovations dans ce secteur, son développement ne garantit pas, par lui-même, une contribution déterminante à la professionnalisation des apprenants. Les nombreux succès ponctuels et l’adoption souvent réussie par ses praticiens des principes de l’English for Specific Purposes n’aboutissent pas à la construction satisfaisante d’un ensemble de connaissances transmissibles aux futurs enseignants LANSAD. Le secteur s’éternise au stade des débuts par incapacité à fédérer des avancées nombreuses et riches, mais particulières, et à assurer par là même la formation des nouvelles générations de praticiens LANSAD. Parce qu’il se fonde quasi exclusivement sur les besoins contingents des apprenants et qu’il n’intègre pas la dimension historique des langues de spécialité, l’ESP souffre des mêmes insuffisances.

67Pour que les langues contribuent davantage et mieux à la professionnalisation des apprenants, le LANSAD et les LSP ont structurellement besoin les uns des autres. La croissance rapide du LANSAD est une chance historique pour les LSP car il représente pour leurs recherches le champ d’inspiration et d’application le plus naturel. Symétriquement, tous les linguistes qui y enseignent les langues générales sont des praticiens des LSP qui s’ignorent et qui ont potentiellement besoin des avancées de ce domaine. Pour que ces deux mondes collaborent, il importe qu’offre et demande se répondent.

68Or, tout indique que, dans la conjoncture actuelle, c’est l’offre qui doit créer la demande. Il revient aux praticiens des LSP d’aider le LANSAD à se spécialiser. La meilleure façon de relever ce défi est que les chercheurs défrichent les nombreuses variétés spécialisées des langues dont le LANSAD a besoin, qu’ils les décrivent et les structurent en tant qu’objets scientifiques. Une offre de formation solide d’enseignants porteurs de réponses adaptées au secteur LANSAD deviendra alors disponible : les masters en langues étrangères spécialisées (LES) offriront des perspectives prometteuses à cet égard. Par là même, les praticiens des LSP créeront le vivier d’étudiants où les futures générations d’enseignants et de chercheurs se développeront. En répondant aux besoins du secteur LANSAD, ils assureront leur propre avenir.

69Dans ce grand chantier en cours de lancement, les membres de l’APLIUT ont un rôle crucial à jouer. Leur association fédère plusieurs langues vivantes et vingt-cinq types de départements d’IUT, c’est-à-dire un éventail exceptionnellement diversifié de LSP. Même si les enseignants-chercheurs y sont peu nombreux, un effort de recensement et de description des LSP peut y être entrepris comme nulle part ailleurs. Une partie importante des solutions envisageables pour professionnaliser les formations par les langues se trouve certainement parmi les linguistes des IUT et, singulièrement, ceux de l’APLIUT.

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Notes

1 Cet article est issu d’une conférence plénière présentée le 31 mai 2013 à l’IUT de Montpellier dans le cadre du 35e congrès de l’APLIUT.

2 Parmi les promoteurs et les diffuseurs de l’appellation LANSAD figurent, entre autres, Michel Perrin, Francisque Costa, Michèle Rivas, Jean-Marie Baïssus et Anne Azam-Pradeilles (Perrin 2008 ; Mémet 2001 : 311).

3 Les Cahiers de l’APLIUT, Vol. XXVII N° 1, Février 2008. Numéro spécial « LEA/LANSAD Convergences/Divergences ». http://apliut.revues.org/1503.

4 Sur ce point, les IUT ont l’avantage d’être étroitement impliqués dans la définition des PPN (programmes pédagogiques nationaux). L’APLIUT y participe pour les langues vivantes dont les programmes sont adaptés aux différents départements et beaucoup plus détaillés qu’un simple horaire.

5 Les Cahiers de l’APLIUT, Vol. XXXI N° 3, octobre 2012. « La certification en langues – État des lieux ». http://apliut.revues.org/2959.

6 IAE : institut d’administration des entreprises. IEP : institut d’études politiques.

7 Yet, despite 20 years’ work in ESP and despite the large number of description and discussion of its theory and practice ESP practitioners in my experience tend to ignore the past. ESP practitioners are concerned with the ‘here’ and ‘now’ of their own working situation; in general they do not look across to see what other people in similar situations are doing and they do not look back to see what people in their own or other situations have done. (Swales 1985 : 2)

8 Master LLCE Spécialité études anglophones – Anglais pour le secteur LANSAD (didactique de l’anglais ; anglais de spécialité).

9 Master – Études anglophones ; spécialité Anglais de spécialité : culture et traductions spécialisées.

10 Au sein de cette collection, chaque variété spécialisée d’une langue fait l’objet d’un ouvrage de recherche et d’un manuel. Le premier volume de recherche est paru en 2012. Il définit et décrit l’anglais de la bourse et de la finance de façon théorique et historique. Le manuel correspondant a été publié en septembre 2013.

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Pour citer cet article

Référence papier

Michel Van der Yeught, « Développer les langues de spécialité dans le secteur LANSAD – Scénarios possibles et parcours recommandé pour contribuer à la professionnalisation des formations »Recherche et pratiques pédagogiques en langues, Vol. XXXIII N° 1 | 2014, 12-32.

Référence électronique

Michel Van der Yeught, « Développer les langues de spécialité dans le secteur LANSAD – Scénarios possibles et parcours recommandé pour contribuer à la professionnalisation des formations »Recherche et pratiques pédagogiques en langues [En ligne], Vol. XXXIII N° 1 | 2014, mis en ligne le 03 mars 2014, consulté le 28 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/apliut/4153 ; DOI : https://doi.org/10.4000/apliut.4153

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Auteur

Michel Van der Yeught

Michel Van der Yeught est professeur des universités à l’université d’Aix-Marseille, président du Groupe d’Étude et de Recherche en Anglais de Spécialité (GERAS) et directeur de la collection Langues de spécialité aux Éditions Ophrys. Ses recherches portent sur l’anglais économique et financier, l’histoire financière américaine et la théorisation des langues de spécialité. Ses dernières publications comprennent Une histoire de Wall Street (Eska, 2009), L’anglais de la bourse et de la finance : description et recherche (Ophrys 2012) et Manuel d’anglais de la bourse et de la finance (Ophrys 2013).
michel.vanderyeught@univ-amu.fr

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